En prolongement direct de notre précédent article relayant les inquiétudes – que nous partageons – formulées par quatre associations de défenses de victimes d’accidents à l’égard des propos tenus par Madame le Garde des Sceaux -Ministre de la Justice concernant l’adoption d’un barême d’indemnisation, le secrétaire général de la Fédération Nationale des Victimes d’Accidents Collectifs (FENVAC) a présenté dans le Journal des Accidents et des Catastrophes (JAC) les arguments qui s’opposent à un tel projet, les dernières nouvelles dont il dispose sur son évolution, et les propositions qu’il formule en réplique aux assureurs.
Barême d’indemnisation: un projet porté exclusivement par les assureurs…à l’encontre des droits des victimes
M. Stéphane Gicquel rappelle à juste titre que l’idée de barème d’indemnisation ne correspond pas à une demande des associations de victimes, ni des magistrats, mais répond à une attente formulée à de multiples reprise par les seuls assureurs, dont la finalité serait d’une part une baisse du coût global des accidents corporels, et d’autre part une meilleure prévisibilité financière de ceux-ci.
Le “fait générateur” de cette démarche des assureurs remonte à la rédaction du “livre blanc du dommage corporel” en 2008, suivie par la première mouture de la proposition Lefrand de 2010.
Or, non seulement le “livre blanc du dommage corporel” n’a été suivi d’aucun effet pratique mais aussi et surtout, le député Lefrand a “revu sa copie” en cours de route pour abandonner l’idée d’un référentiel-barême d’indemnisation au profit de celle d’une base de données des indemnisations des victimes.
Depuis, les assureurs ont poursuivi leurs efforts auprès des pouvoirs tant exécutif que législatif, se voyant systématiquement opposé une fin de non-recevoir basée sur le principe de réparation intégrale de la victime, et son corollaire d’individualisation des dommages et intérêts.
Il semble que ce “lobbying” des assureurs se porte aujourd’hui sur le pouvoir judiciaire.
En effet, des magistrats de la Cour d’appel de Paris se seraient auto-saisis de cette question, et travailleraient sur l’élaboration d’un barème d’indemnisation ainsi que sur une méthodologie, et ce en concours avec une vingtaine de présidents d’autres cours d’appel.
Le fruit de ce travail serait redoutable car, même non inscrit dans la loi ou le règlement, il constituerait une base d’évaluation du préjudice de la victime qui aurait force de droit dans les faits.
Les propositions pour contrecarrer l’adoption d’un barême d’indemnisation
L’opposition à ces tentatives s’organise, et le “front commun” formé à cette occasion par quatre grandes associations de défenses des victimes d’accidents (APF, FNATH, FENVAC, UNAFTC) est un exemple à suivre.
Outre la maladresse (espérons-le !) des propos de Madame le Garde des Sceaux sur la victime non ou mal représentée, il est suggéré de partir d’une base de données existante, les fichiers AGIRA, mise en place suite à l’adoption de la loi du 5 juillet 1985, dont la gestion exclusive a été confiée aux assureurs de sorte qu’à ce jour, les informations qui y sont inscrites sont malheureusement très parcellaires pour ne pas dire partiales.
L’idée serait donc de mettre en place une base de données recensant l’ensemble des transactions, et décisions judiciaires liquidant l’indemnisation des victimes d’accidents, alimentée contradictoirement par l’ensemble des protagonistes en la matière (assureurs, magistrats, mais aussi représentants de victimes).
A suivre donc avec beaucoup de vigilance !